L'initiation chrétienne, vous le savez, c'est ce qu'accomplit celui qui
reçoit le baptême. On lui donne ce nom, même quand le baptisé est enfant,
mais elle prend une forme particulière chez les adultes. Le mot
"initiation" est issu du verbe latin "in-ire", qui signifie "entrer". Or
le verbe "s'engager" a la même signification, lorsque l'on dit, par
exemple, qu'une voiture s'engage dans une route ou un chemin. C'est donc
bien à la même notion qu'on a affaire. Cela pourrait peut-être suffire à
justifier le texte de l'article, mais il y a d'autres éléments
concordants. Dans le groupe de catéchumènes dont je faisais partie, au
cours d'une rencontre de préparation, les responsables nous avaient soumis
une liste d'expressions, pour nous aider à la méditation. Parmi elles se
trouvait précisément le mot "engagement".
Ce mot nous paraissait à la fois essentiel et étrange. Nous nous sommes
demandés en particulier si le mot ne rappelait pas trop l'armée. Au fond,
c'est un peu le cas, tant les Chrétiens portent parfois le nom de "soldats
du Christ". Les armées sont souvent soumises à une discipline très
stricte. N'en est-il pas de même de l'Eglise du Christ ? Le Chrétien doit
en effet respecter un certain nombre de commandements, et cela n'est
jamais facile ; au contraire, on préférerait souvent qu'ils n'existent
pas !
Mais le plus important dans ce domaine, c'est peut-être la manifestation
de volonté requise pour la validité de cet engagement. Un soldat qui
s'engage est fondamentalement un volontaire. Il en est de même de celui
qui accomplit l'initiation chrétienne. Au cours du "baptême par étapes",
le prosélyte doit apposer sa signature à trois reprises. L'entrée en
catéchuménat est en effet consignée sur un registre. La cérémonie de
"l'appel décisif", qui a lieu au début du Carême, comporte en son centre
un rite appelé "inscription du nom". Ceux qui inscrivent leur nom
s'engagent à recevoir les sacrements. Puis, juste après que le ministre a
conféré le baptême, mention en est portée sur le "registre des baptêmes",
que l'on appelle parfois le "livre de vie" de la paroisse.
L'Eglise catholique se voit parfois reprocher son trop grand formalisme.
Je pense malgré tout, et pas seulement parce que j'ai été frotté de
diplomatique, que tout cela est indispensable. Je n'oublie pas que le
baptême est avant tout une grâce, qu'il est le signe de la vie éternelle,
mais c'est aussi un acte juridique. Car il importe que la volonté du
baptisé se manifeste dans sa libre réponse à l'appel du Christ aimant.
L'engagement comporte évidemment une dimension à laquelle je veux à
présent venir. On ne s'engage évidemment pas dans le vide, mais à la suite
du peuple de Dieu. Celui qui devient chrétien entre dans l'Eglise, "peuple
de Dieu, Corps du Christ, temple de l'Esprit". Pour filer la métaphore
militaire, on parle aussi de corps d'armée. Tous ceux qui entrent dans un
groupe de catéchuménat l'affirment : c'est la communauté des croyants qui
les a incités à suivre ce chemin. Au cours du catéchuménat, on mesure
mieux le rôle de la paroisse, de l'aumônerie. L'engagement donne la place
au groupe et, comme il nous a été dit, être de l'Eglise, ce n'est pas
seulement respecter quelques commandements, c'est aussi adhérer au Credo
du peuple de Dieu.
Je n'oublie pas le premier sens du mot "engagement", dont la racine est
"gage". Recevoir le baptême, c'est donner une sorte de gage au Christ, le
signe qu'on Lui appartient déjà, le signe qu'on reconnaît que l'on Lui
doit la vie. Mais le baptême est aussi un gage de la part de Dieu, puisque
c'est la marque de Son Amour, et, comme l'Eucharistie, un avant-goût du
Royaume.
Enfin, j'ajouterai que le Chrétien est toujours appelé à l'engagement,
mais que tous ceux auxquels il prend part s'inscrivent dans ce premier
engagement, celui de l'initiation chrétienne.
La déformation professionnelle m'amène à signaler une référence
bibliographique. J'invite ceux qui ne le connaîtraient pas à lire ou du
moins à feuilleter le Rituel de l'initiation chrétienne des adultes,
nouv. éd, Paris : Desclée/Mame, 1997. Le Catéchisme de l'Eglise
catholique traite du baptême aux numéros 1213 à 1284.
Article paru dans Sénevé
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