Naissance du Féminin

Suite au cinquième Évangile


Xavier Morales



La femme naît du sommeil de l'homme. Et sa naissance, qui est sa connaissance, la fait surgir du rêve. Née du sommeil de l'homme, elle est prise de son côté, de la profondeur cachée sous le coeur de l'homme, part rêvée, insaisissable, enfouie, part du désir. La femme, alors, est le désir de l'homme.
La femme est créée après l'homme: elle est son mystère, elle est aussi son vis-à-vis. Elle est le sourire qui répond -l'achèvement. La plénitude du ventre bombé -l'homme contemple en elle qui est homme la création accomplie et achevée en l'homme, et la promesse faite à lui de l'homme qui doit venir; c'est la femme qui porte cette promesse, en son ventre, en son sourire, visage ouvert et clair, clarté de l'homme: ``elle est la gloire de l'homme"(1 Co XI, 7).
Et créée après l'homme, la femme aussi, mystérieusement, est avant l'homme, comme l'alpha est avant l'oméga. La sagesse créatrice est femme, elle qui porte dès l'origine le monde et la volonté de Dieu. C'est que la femme, qui est le visage et le sourire de face de l'homme, la contemplation de sa gloire, est aussi, en cette science, qu'acquiert l'homme de lui-même en elle, sagesse antérieure et inconsciente d'elle-même, non créée encore, nescience, mystère qui réside auprès de Dieu avant les temps, dans la latence des mondes (Pr VIII, 22 sqq.). Au commencement, la femme est le mystère de l'homme, comme elle est à la fin son dévoilement à soi.



Pierre Emmanuel, Le grand oeuvre, Hymne au Père, pp. 120-121.


Et l'homme vient ensuite, comme Dieu s'engendre éternellement un Fils au sein de sa Sagesse Éternelle, comme de nouveau Marie engendre le dernier homme, en qui se contemple enfin l'homme parfait.
C'est en ce jeu équivoque que se joue le mystère de la femme, qui est au début de toute chose, et qui pourtant vient après l'homme comme sa révélation; elle est le halo qui est le resplendissement. Elle est à l'homme comme son ombre et son éblouissement, sa profondeur et son éclatement, le centre et en même temps tout ce qui échappe à lui, la brèche par où il se regarde. L'autre. Dieu en engendrant le Fils, en créant la création, invente l'Autre, et ce dont il devient l'Autre. Et tirant la femme de l'homme encore, il en fait l'image de lui-même; la femme est l'image de Dieu, car elle est l'Autre, absolument mystérieuse à l'homme. Elle est le vierge, ce qu'il faut violer pour y pénétrer, ce qui est fermé et en même temps donne le vertige à force d'être abyssalement ouvert. La brèche en lui, déclarant l'Autre si infiniment loin de lui.

X.M.


Article paru dans Sénevé


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