Propos sur la pauvreté





J'aurais voulu, comme pauvreté de base, une pauvreté sans marque de fabrique : ni prolétarienne, ni rurale, ni étudiante... mais d'abord la pauvreté que montre le Seigneur : le manque de puissance, le manque de brio ; la pauvreté d'un petit monde, l'humilité du pauvre. Etre des "petits", dans n'importe quel métier, sans demander avis au devoir d'Etat des convenances sociales. Etre pauvre, comme s'habillent certains pauvres... Etre surtout seulement des candidats à la pauvreté : car c'est Dieu qui la donne.




Plus on va, plus on sait qu'excepté ce que Dieu nous donne, nous n'avons rien à nous qui puisse être proportionné à l'amour que nous voulons donner, un amour premier, un amour plus grand. C'est peut-être ce qui nous fait découvrir la souffrance comme non seulement la livrée de ceux qui aiment, mais aussi comme leur langage, la souffrance dont on souffre mais qu'on offre : en vous offrant ce que je perds, Seigneur, je vous dis que je vous aime davantage, parce que vous êtes davantage tout ce que j'aime.



Madeleine DELBRÊL
Lettres, 1956.


Article paru dans Sénevé


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