Bonne Nouvelle à la Santé !

Une chartiste prenant la plume pour Sénevé... miracle¹ ! Car le chartiste ne pense pas par lui-même (saint Grégoire de Tours est son gourou attitré), n'écrit pas lui-même (mais édite les textes d'autrui), et surtout n'est jamais publié (excepté en auto-publication dans Mémoires et Documents de l'École des Chartes²).
``Les couloirs du temps se sont ouverts''³... après les périlleuses tribulations de moinillons contées avec art par l'enchanteur Legendrus⁴, Fais-des-Ricochets⁵, après avoir pris sa potion magique, est sortie des oubliettes⁶ de l'histoire et a réintégré le temps normal(ien).
Après cette brillante captatio benevolentiae, j'abandonne mon ton badin⁷ et mon système de notes⁸, pour vous livrer les quelques impressions qui ont retenu mon attention lors des messes à la prison de la Santé. Seules quelques notations impressionnistes et personnelles seront ici relevées.

``Or Jean, dans sa prison, avait entendu parler des oeuvres du Christ. Il lui envoya demander par ses disciples : ``Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ?'' '' (Matthieu XI, 2-3)
``L'Esprit du Seigneur est sur moi parce qu'il m'a conféré l'onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté, proclamer une année d'accueil par le Seigneur.'' (Luc IV, 18-19)

Ce qui m'a tout d'abord surprise, ce sont les remerciements dont j'ai fait l'objet de la part des détenus et des deux aumôniers. Que faisais-je là d'extraordinaire ? Assister à la messe dominicale, à 500 m de chez moi, moi, une chrétienne lambda ? Eh bien, c'était, je crois, cette présence qui leur réjouissait le coeur, bien plus que les quelques chants nouveaux que je connaissais et ma voix de soprano !
Pour les détenus, cela signifie qu'humainement on s'intéresse à eux (j'ai rencontré un gardien et un avocat qui s'en sont beaucoup étonnés !), alors que parfois leurs familles ont peu à peu rompu les liens. Et dans la foi, cette présence manifeste la fidélité du Seigneur, au milieu des épreuves.
De même l'unité de l'Église qui ne saurait s'arrêter au pied d'un haut mur tout noir, est ici mise en valeur et concrètement vécue. C'est l'ensemble de l'Église ``du dehors'', à travers ma personne, qui se trouve en communion avec les détenus. Quelle joie quand Jésus vient réellement habiter ces lieux, pour nous et sans distinction, pendant quelques moments (on peut regretter l'absence de tabernacle pour une présence réelle permanente). Cette communion est naturellement alimentée et continuée par la prière mutuelle tout au long des semaines.

Les aumôniers aussi sont heureux de notre présence. Un des prêtres me rappelait qu'il était bon pour eux de se sentir ``aidés moralement'' : en effet, ici, point de somptueux ornements liturgiques, d'assemblée répondant ``au quart de tour'' à vos invitations, et vous complimentant à la sortie sur votre homélie, mais bien plutôt le sentiment d'être dans un microcosme coupé de ``la vie paroissiale ordinaire''. Par notre présence, l'Église soutient leur ministère parfois ingrat et laborieux, et réalise la mission qui est la sienne de savoir accueillir chacun, quelle que soit sa situation.

Arrivée à ce point de l'article, je ne voudrais pas que l'on pense que j'ai un ego particulièrement développé. Je veux simplement souligner qu'une simple présence pouvait être merveilleuse et féconde, et que cette remarque était applicable à toutes les occasions de nos vies.

Je voudrais enfin mentionner l'échange de la Paix du Christ, moment, me semble-t-il, un peu banalisé dans nos célébrations, et qui prend ici un relief tout particulier. Il nous fait prendre conscience que nous sommes tous des pécheurs pardonnés. Certains sont sanctionnés par la justice des hommes, d'autres non... mais nous sommes tous indignes de paraître devant Dieu. Nous ne pouvons compter que sur sa miséricorde pour que sa Paix habite dans nos coeurs.

Article paru dans Sénevé

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