Une expérience de cathéchumenat

Aude Chauty




Le Sénevé de rentrée semblait avoir besoin d'articles, et je viens donc juste apporter une toute petite contribution pour vous parler d'une « activité » qui me tient particulièrement à coeur : le catéchuménat. Cette aventure, que j'ai commencée un peu par hasard il y a un an, a pris beaucoup d'importance dans la vie de Vanessa, la jeune fille que j'accompagne, et dans la mienne. Je voudrais vous en dire quelques mots, d'une part parce que l'on parle actuellement beaucoup de ce « retour à la foi » des adultes, et d'autre part pour vous dire qu'il y a des besoins, et que c'est formidable !


Il y a un an, dans ma paroisse, en début d'année, une feuille, avec les différents services dont la paroisse avait besoin fut distribuée. Je venais de refuser de m'occuper d'une aumônerie de lycée (pour cause d'agreg...), mais je cherchais tout de même à m'impliquer dans quelque chose. J'ai tilté sur le mot catéchuménat, en ai parlé au curé, en lui disant bien que je n'avais ni formation particulière ni expérience, et me suis lancée.


Bon, soyons claire, me disais-je : je n'ai aucune formation solide en théologie, suis bien jeune par rapport aux autres accompagnateurs (qui ont plutôt l'âge de nos parents...), et suis donc complètement folle de m'être proposée. Le curé a peut-être eu tort d'accepter. Enfin bon, il n'a pas refusé, et doit bien avoir réfléchi, donc c'est que ca doit aller. Consciente de mon ignorance, j'ai vite réalisé que ce n'est pas de l'enseignement que j'allais pouvoir faire, mais du témoignage. Essayer d'aider une catéchumène à avancer, quand on avance soi aussi jour après jour, ça ne doit pas être impossible !


Concrètement, l'accompagnement se passe de la manière suivante : tous les mois, une rencontre en groupe (4 catéchumènes, 4 accompagnateurs, le curé et un frère franciscain), et environ tous les quinze jours, un temps uniquement à deux. Nous abordons des thèmes variés (les femmes dans la Bible, Jésus, le Pardon), que nous préparons à deux, et sur lesquels nous partageons en groupe. Le partage nous permet d'exprimer en profondeur ce que nous vivons, et d'oublier très vite qui est accompagnateur et qui est catéchumène : nous sommes tous chercheurs de Dieu ; c'est tout !


Vanessa a 21, vient de boucler une maîtrise de sciences politiques, et n'a recu aucune éducation religieuse. Au départ, elle disait chercher ici une formation en culture religieuse. Elle n'y connaissait rien, sentait que ça lui manquait, et voulait combler ses lacunes. Pour elle, le coté «foi» n'était pas l'essentiel. Si toutes ces histoires étaient vraies, et bien tant mieux ; sinon, tant pis : après tout, ca ne peut pas faire de mal d'être baptisée !


Dans sa démarche initiale, qui était donc très intellectuelle, elle cherchait des règles. Elle me demandait sans cesse si l'on devait manger différemment, poser le pain à l'envers sur la table, faire telle ou telle chose. Elle cherchait des commandements. J'ai été très déconcertée par ces questions. Je voulais lui parler de foi ; elle me parlait de loi. C'était d'autant plus troublant que je ne me suis jamais sentie obligée à faire quoi que ce soit (c'est à la liberté que nous sommes appelés, non ?). Au contraire, pour moi, la découverte de l'Amour de Dieu nous submerge à un tel point que nous ne pouvons pas trouver d'autre solution que d'entamer nous aussi une démarche d'Amour.


Petit à petit, nous avons avancé. Elle, en découvrant que le plus grand commandement est celui de l'Amour, moi en voyant le travail que Dieu fait en elle, la vitesse à laquelle elle se transforme, et en me laissant bousculer dans ma foi par ses questions.
Les accompagnateurs sont unanimes : le catéchumène ne se rend pas compte à quel point il nous fait avancer, à quel point les échanges sont à double sens. C'est décapant, mais vivifiant !


En effet, pour oser commencer à expliquer à quelqu'un l'idée de Trinité (modestement, rassurez-vous, car ça m'est plus que difficile !!!!), sans avoir l'impression de ressortir un cours de catéchèse, il faut mûrir cela, laisser les questions surgir, tenter d'y répondre, par la prière, par des lectures, etc...
Accompagner un catéchumène, c'est plus que jamais chercher à exprimer le fond de sa foi, en vérité, sans artifice, sans vérité toute faite, sans cacher ses doutes et ses difficultés. C'est pour moi une école d'humilité, et une grande poussée qui me fait avancer.


Vanessa a commencé à aller à la messe il y a quelques mois. Nous rions quand je ne jongle pas assez vite dans le Prions en Eglise pour qu'elle puisse suivre, et elle râle quand les gens à qui elle a fait le baiser de paix à la messe ne sourient pas quand elle les croise dans la rue, ou quand elle fait la quête et que personne ne lui sourit. Elle disait récemment : «pendant la messe, c'est un débordement d'Amour. Mais je ne suis pas sûre que cet Amour, les gens le vivent à l'extérieur». À nous tous de savoir vivre ce débordement d'Amour en tout temps, et d'accueillir ces catéchumènes, qui nous renouvellent et nous émerveillent. Pour elle, la communauté chrétienne a une grande importance : elle me force par exemple à aller dire bonjour à beaucoup de gens à la fin de la messe, moi qui m'en irais sans doute un peu vite...


Bref, pour conclure, je dirais que sans s'en rendre compte, Vanessa m'empêche de m'endormir dans une petite foi qui me suffirait ; elle me force à aller plus loin, à ne jamais me sentir en possession d'une vérité, d'une foi enfin acquise ; elle me rappelle sans cesse que nous sommes avant tout en route, et que nous sommes nombreux à faire route ensemble. Ça paraît peut-être tout bête, comme ça. Et ça l'est ! Nous ne faisons rien d'autre que d'essayer d'avancer ensemble, simplement et c'est passionnant ! Si l'expérience vous tente, n'hésitez pas, ce ne sont pas les besoins qui manquent !

A.C.


Article paru dans Sénevé


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