1 : On rappelle pour les jeunes filles qui se rendraient sous peu à un mariage (tala par exemple) que la coutume commande à la mariée de lancer, au cours de la fête consécutive à la cérémonie, le dit bouquet vers ses dames d'honneur, et aux dames en question de rivaliser d'agilité pour saisir la première le merveilleux objet: cet exploit garantit un prompt mariage à la gagnante...
2 : Quand on veut faire très chic, comme lors de certains mariages princiers, on la choisit en hermine et satin, histoire d'avoir un matelas confortable si d'aventure l'émotion était trop intense pour ne pas s'évanouir et tomber à la renverse...
3 : On s'en assurera en se rappelant le mouvement de panique qui saisit le futur époux ou le témoin du mariage lorsqu'aux accords de la marche nuptiale de Mendelssohn, il vide en vain les poches de son pantalon pour retrouver les précieux anneaux, alors qu'ils sont bien évidemment dans sa veste...
4 : On fait ici référence au Cantique des Cantiques bien sûr, mais aussi à d'autres livres traitant ce thème d'une manière significative, en construisant leur récit sur une double alliance, une première brisée, puis, après la colère divine, une seconde définitive : Osée, Ezéchiel(surtout le chapitre 16), Jérémie et Isaïe(à partir du chapitre 51). Le Nouveau testament reprend bien sûr cette métaphore, chez Matthieu(chap.9, 22, 25), Jean, etc... cf l'article de Marie-Alice.
5 : Il est illusoire de vouloir faire une histoire de l'anneau nuptial sans s'attarder, autant que faire se peut (les archives posent toujours problème.), sur telle ou telle région, à telle ou telle époque. Si le coeur vous en dit, et si aucun autre sujet de maitrise ne vous tente, je tiens à votre disposition des archives abondantes sur le poids des alliances dans la branche cadette d'une famille haut-marnaise bien connue à Laferté sur Amance, les Rocher (prononcez '-ère'), aux 18ème et 19ème siècles(!). J'ai préféré pour ma part faire de la compilation d'ouvrages plutôt que d'entreprendre une étude de longue haleine, d'où les insuffisances et les lacunes , les raccourcis d'un article qui, pour entrer parfois en contradiction avec celui de Baptiste, n'est pas comme lui le produit d'une recherche personnelle. Voici donc mes références : J.Cl. Bologne, Histoire du mariage en Occident, JCLattès, 1995, réédition Hachette "Pluriel", 1998. (intéressant et très précis, accessible à tout public, fait par un philologue) ; J.B. Molin, P. Mutembe, Le rituel du mariage en France, du XIIe au XVIe siècle, Beauchesne, 1974 (très bien documenté et agréable à lire - ce qui est plutôt rare pour un bouquin de théologie historique...) ; Le mariage au Moyen Âge, Actes du colloque de Montferrand, mai 1997 (très riche).
6 : Pour une fois, et pour le plus grand plaisir des correcteurs de dissertations, il n'est pas du tout sûr que "de tout temps, les hommes et les femmes se sont passé la bague au doigt"...
7 : cf Dr Pierre Theil, Histoire et Géographie du mariage, Berger-Levrault, 1969.
8 : On observe perpétuellement ce décalage entre une Europe méditerranéenne (Italie, Espagne, Sud de la France), dite d'influence romaine, puis wisigothique, et une Europe septentrionale, dite de rite germain ou normand, ayant plus de mal à accepter le mariage à l'Eglise et la bénédiction de l'anneau. On y fera encore référence plus tard.
11 : C'est-à-dire la plus haute autorité religieuse dans le royaume des Francs à l'époque.
12 : Le Wessex est le premier grand royaume de la future Angleterre à même de lutter contre l'invasion danoise.
13 : cf dom Korbinian Ritzer, Le Mariage dans les Eglises chrétiennes du Ier au XIeme siècle, Cerf, 1970. (très important)
14 : cf pour plus de détails et pour une étude serrée d'un texte d'Hincmar de Reims: Sylvie Joye, De Pacis custodia per conjugium et feminam, mémoire de maitrise Paris I, 1998. (c'est une copine!)
15 : Le Synode provincial de Rouen de 1012 demande déjà: "que les épousailles ne s'accomplissent pas en secret, ni après le repas, mais que l'époux et l'épouse à jeun soient bénis dans l'église par le prêtre à jeun", et il ajoute "et avant qu'ils ne soient unis, que l'ascendance de l'un et de l'autre soit l'objet d'une sérieuse enquête".
16 : On le remarquera aisément en contemplant le porche d'églises gothiques par exemple, où les statues représentent souvent, pour l'une des portes, le mariage de Marie et de Joseph, ou celui de Joachim et d'Anne, devant le temple de Jérusalem. Ces célébrations étaient d'ailleurs autant d'occasions de "parfaire", par l'image (les sculptures, les vitraux, les miniatures, les fresques, même les tableaux), la culture biblique des croyants, souvent peu au courant des détails des écrits saints...
17 : Josiane Teyssot, dans le colloque de Montferrand de 1997, fait ainsi remarquer que le vitrail de la cathédrale de Clermont-Ferrand représentant l'échange des anneaux entre Philippe III le Hardi et Isabelle d'Aragon le 28 mai 1262 (cf dans ce Sénevé), est certes un bel exemple de représentation du mariage au XIXe s., mais ne correspond en aucune manière à la vérité historique. Cet échange a très probablement eu lieu devant l'église, surtout devant le peuple, d'autant plus qu'il concluait une alliance d'une importance vitale pour le royaume, la difficile paix de Corbeil de 1258... De plus, il fallait montrer le corps du dauphin et le futur couple royal aux sujets clermontois, assez remuants depuis le début du siècle. Cette fonction de visibilité, très importante au Moyen-Âge, se perpétua très longtemps, jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.
18 : Il y subsista longtemps : au Xeme siècle encore, l'Eglise condamne certes comme illicites et punit de peines ecclésiastiques les mariages dits clandestins, c'est-à-dire accomplis à la maison sans la présence d'un prêtre, elle les reconnaît pourtant comme valides. Ce n'est qu'avec le Concile de Trente, en 1563, que la "forme canonique", en présence de prêtre, est imposée sous peine d'invalidité du mariage. Mais Molin et Mutembe font remarquer que certains décrets de ce Concile, et en particulier cette invalidité, n'étaient pas encore promulgués partout au début du XXeme siècle...
19 : On rappelle que le prêtre bénissait pendant les fiançailles l'anneau et la chambre nuptiale, prérogative qu'il a donc partiellement gardée en sortant du domicile paternel.
20 : cf Arnold Van Gennep, Manuel de folklore français contemporain, Paris, 1943-46
21 : On se souvient que le statut autonome de l'alliance a été conquis en l'arrachant de la masse indifférenciée de arrhes, cadeaux d'épousailles de l'époux à sa femme. Cependant cette séparation n'a jamais été complète: d'autres anneaux, des bijoux, sont offerts, de même que subsistent encore assez longtemps les rites du treizain (pièces de monnaie données à bénir, lointain vestige des 13 deniers versés chez les Francs du Veme siècle par le fiancé aux parents de sa fiancée comme prix de transfert de tutelle), des deniers à épouser et des médailles de mariage (pièces spéciales pour les mariages, remplaçant symboliquement le véritable argent).
22 : Ce type de bague antique, symbole par excellence de l'union conjugale, se répand de nouveau au XVIeme siècle pour constituer, au temps de Pierre Labrousse, la forme la plus courante d'alliance. c'est d'ailleurs lui qui donnera son nom à "l'alliance": le mot apparaît pour la première fois en 1611 dans le dictionnaire français-anglais de Cotgrave. Il est souvent gravé du commandement divin :L'homme ne peut rompre ce que Dieu a uni., comme sur la bague de mariage de Luther.
23 : Cette forme d'anneau antique réapparaît au XIIeme siècle, et est largement attestée au Moyen-Age.
24 : Et de plus en plus mauvais goût !
25 : ce qui n'était pas rare au Moyen-Age : cf les légendes touchant à l'alchimie. La bague nuptiale devait de toute façon être en métal. Au Moyen-Age,en signe d'infamie, on mariait avec un anneau de paille ceux qui avaient été condamnés à s'épouser pour avoir pris une avance sur les noces. On les unissait à Paris, dans une des plus petites églises, Ste-Marine. cf Adolphe Chéruel, Dictionnaire historique des institutions, moeurs et coutumes de la France, Paris, 1865.
26 : La dernière mode en matière d'alliance est un petit anneau serti d'une petite pierre, se rapprochant beaucoup de la bague, ou bien des anneaux entrelacés, soudés ou torsadés, avec parfois un mélange d'ors de différentes couleurs (modèles "duos"). c'était la rubrique "Habillez vos mains aux couleurs de l'automne !" de Sénevé...
27 : Avec ce choix de doigt, il a fallu trouver un moyen d'arriver jusqu'à l'annulaire tout en bénissant la main de la promise: on a donc rajouté Amen après la mention de la Trinité. Cette gestuelle n'est plus utilisée aujourd'hui.
28 : cf le rôle central de l'anneau dans l'Hécyre de Térence.
29 : L'anneau n'est cependant que rarement véritablement dissuasif, sauf dans des cas très particuliers (reconnaissance immédiate de l'anneau comme directement lié à une autorité supérieure par exemple), du fait de la violence et de la rapidité de l'acte, du fait aussi de la difficulté de retrouver le criminel, et donc d'exécuter la vengeance.
30 : cf l'illustration quelque part dans ce Sénevé, cf aussi par exemple au Louvre, dans un tableau très beau de l'Italien Fra Bartolomeo.
31 : J'ai tenté d'un peu clarifier les choses, mais je sens comme des vastes zones d'ombres à la fois dans mes lectures et dans mon petit exposé... J'espère cependant avoir contenté mes amis chartistes (entre autres Nathalie) par l'accumulation de notes en bas de pages...