La crise des vocations sacerdotales
C. M.
Pour Mgr Hippolyte
Simon, évêque de Clermont-Ferrand, le terme de "crise" est
impropre car lorsqu'il était au séminaire (voilà plus de 35 ans), on
parlait déjà de "crise" --- ce qui est sensé correspondre à un phénomène bref.
Le phénomène est donc sans doute plus complexe.
Chiffres et faits
Évolution du nombre des ordinations sacerdotales en France, de 1900
à 1999
Après les chocs consécutifs à la séparation de 1905 puis à la guerre 1914--1918,
une remontée s'amorce jusqu'à la seconde guerre mondiale. La courbe
atteint son maximum pour les années 1939--1949 , puis elle tombe
régulièrement de 1949 à 1975. Depuis cette date, nous sommes sur un palier
relativement stable.
Une idée répandue veut que la baisse des vocations en France date du
concile Vatican II. Ce document démontre le contraire, car la baisse s'amorce
dès les années 1950.
Nombres de séminaristes (dont entrées en 1ère année)
Depuis la deuxième guerre mondiale, le nombre de séminaristes connaît
une baisse régulière, jusqu'à 1975--1977, puis un palier depuis 1977. Ce
palier marque une très légère reprise au début des années 80. Mais il
amorce une légère tendance à la baisse depuis 1995.
Les ordinations depuis 1951
Les bacheliers depuis 1951
On note que les deux courbes sont exactement inverses. Pour Mgr Simon, on
peut intuitivement en déduire l'importance colossale du rapport à la
culture universitaire pour l'évolution des vocations en France.
Le fait que l'on constate le même phénomène entre la courbe du
nombre de religieuses et celle des filles dans l'enseignement supérieur
suggère une corrélation entre le développement et la diminution du nombre
de religieuses. Voilà un excellent sujet
de recherche pour des étudiants en sociologie ou histoire ! (D'ailleurs,
Mgr Simon leur lance un appel.)
Progression du nombre de diacres en France depuis 1970
À ces quelques données chiffrées, il faudrait ajouter l'étude des
religieux et celle des communautés dites «nouvelles». Mgr Simon lance
là encore un appel à des étudiants candidats à un mémoire sur le sujet !
Quelle analyse proposer ?
Peut-on dire que la baisse a été enrayée ces dernières années? Évidemment
non dans la mesure où la diminution du nombre des prêtres va faire sentir
ses conséquences à très long terme.
Concrètement ces conséquences sont de deux ordres :
-
la diminution du nombre de prêtres est un phénomène qui
s'auto-entretient : il y a moins de prêtres (et de religieuses, l'évolution
étant parallèle) jeunes pour évangéliser des jeunes qui deviennent de plus
en plus nombreux en situation scolaire nouvelle. D'où un effet de cisaille
: moins de prêtres (et religieuses) jeunes pour les jeunes signifie à long
terme moins de jeunes qui deviennent prêtres.
- Cette situation oblige à une refonte du maillage territorial de l'Église
et à une redistribution des responsabilités au sein des communautés
catholiques. Pour Mgr Simon, cela induit «un travail de recherche et
d'invention plutôt passionnant». Il apparaît aussi de plus en plus
nettement qu'il existe des responsabilités qui sont liées au ministère
ordonné et d'autres qui relèvent du baptême.
Quelles perspectives?
Mgr Hippolyte Simon propose 3 schémas :
-
schéma "mythique" : de nombreux séminaristes se présentent.
- schéma hypothétique : l'ordination d'hommes mariés comme prêtres.
Le problème, c'est que si l'on cherche des hommes, célibataires ou
mariés, pour les ordonner prêtres, on pensera, bien souvent, à ceux
qui sont déjà susceptibles d'être ordonnés diacres, ou qui le sont déjà.
Dès lors, le diaconat permanent disparaîtra. Or le diaconat offre
aussi des perspectives missionnaires intéressantes.
- schéma encore plus hypothétique : l'ordination de femmes mariées
comme prêtres. Celle-ci n'est pas d'actualité pour l'Église catholique
(tout le monde connaît la réponse de Jean-Paul II à ce sujet), ce qui
nous donne finalement le temps et l'obligation d'y réfléchir posément.
Mgr Simon conclut ainsi :
«Plutôt que de passer notre temps à poser des problèmes que nous ne
pouvons pas résoudre, essayons, plus simplement, et plus efficacement,
de résoudre les problèmes que nous pouvons poser. Et que chacun s'examine,
en conscience, devant Celui qui est l'unique Pasteur de son Église.»
Ceci est une synthèse de l'analyse de Mgr Hippolyte Simon sur
«les Vocations en France» (novembre 2001). Elle a été publiée par
le Service National des Vocations, association qui remplace en 1980 le
Centre National des Vocations (lui-même créé en 1959). Les chiffres et
graphiques proviennent du site du SNV.
Pour plus d'informations :
http://vocations.cef.fr/sommaire.htm
C. M.