Impressions pèlerinage romain

Sylvain Perrot








Je ne remercierai sans doute jamais assez le Seigneur de m'avoir donné la grâce de suivre les pas du Christ en Terre Sainte en août 2005. Il était donc tout naturel de prendre le chemin de Rome cette année, à l'image de Pierre et Paul proclamant la Bonne Nouvelle. Ces dix jours passés dans la Vie Éternelle nous ont permis d'engager une vaste réflexion sur les apôtres, mais aussi les martyrs, des temps anciens comme des temps modernes. Car le Père Armogathe, dont l'Italie est comme une deuxième patrie, sait faire jouer ses relations romaines pour nous faire rencontrer ceux qui font fonctionner aujourd'hui l'Église.

Un programme chargé, vous le verrez, mais exceptionnel à tout point de vue. Mémorable aussi, et chacun aura rencontré quelques petits problèmes, mais rien qui n'aura stoppé notre (presque) infatigable marche: retards aériens, soucis podologiques... Mais venez nous suivre dans nos pérégrinations!

Le pélé commence sur les chapeaux de roue. Nous sommes le vendredi 11 août1, il est 7h, et nous nous trouvons place Saint Pierre, nous dénotons parmi les soutanes qui peuplent modestement les lieux. C'est bien tôt en effet que nous avons dû quitter nos lits2 du foyer des Théatins, parce que le pélé s'ouvre par une célébration eucharistique dans la crypte de la plus célèbre basilique de Rome. Nous sommes à quelques mètres de la tombe du Prince des Apôtres. Suit une petite visite obligée de la basilique: nous jetons quelques regards au baldaquin du Bernin, la coupole et la Pietà de Michel-Ange... Un rapide petit-déjeuner, et nous voici dans les jardins du Vatican pour voir ses curiosités: la petite église Saint-Sébastien, la gare et l'Académie pontificale des Sciences3. Sans oublier la Grotte de Lourdes, sise bien sûr sur le Viale della Grotta di Lourdes!

Je vous avais annoncé un emploi du temps chargé, ce qui précède n'occupait qu'une matinée! L'après-midi, après la sieste de rigueur, était consacrée à la visite de la plus ancienne basilique de Rome, Saint-Clément, et les églises du Cælius (les Quatre Saints couronnés et Saints Jean et Paul). Il est temps de parler de notre invité de marque, qui nous a accompagné pendant tout notre périple: le professeur Jean-Michel Carrié, dont nous avons découvert le goût (scientifique bien sûr) prononcé pour les temples de Mithra et les fouilles faites sous l'église des Saints Jean et Paul, qui nous vaudront deux fois porte close!!!




Notre rencontre avec Mgr Sarah.

Le lendemain, 12 août, nous partons un peu plus tard de notre gîte pour rencontrer deux membres de la Curie romaine: Mgr Sarah, du dicastère de l'évangélisation des peuples, la «Propaganda», puis Mgr Rodé, du dicastère des congrégations religieuses. C'est dans ces échanges que nous comprenons un peu mieux comment fonctionne l'Église au quotidien. La journée est riche en rencontres: après un peu de temps libre, nous nous retrouvons à la Villa Médicis, que nous fait visiter Marc Bayart, puis nous sommes accueillis pour l'eucharistie et le repas par le recteur de la Trinité des Monts, aujourd'hui de retour à Paris, Mgr Patrick Descourtieux4.




Le groupe, à la Villa Medicis.

13 août, c'est dimanche, et nous passons la matinée dans un site bien connu des archéologues, l'ancien port romain d'Ostie. Beaucoup de mosaïques (avec des éléphants entre autres), mais aussi des thermopolia5 et des mithræa! De retour à Rome, nous faisons sécession sur le mont Aventin. Nous nous rendons du côté de la demeure des chevaliers de l'ordre de Malte, en bons touristes: si l'on regarde à travers le trou de la serrure, on voit très bien le dôme de Saint Pierre6... Puis nous sommes reçus dans le couvent dominicain de Sainte Sabine par le Père Husson, ravi de nous montrer ce qu'il croyait être un réservoir... idée rapidement démentie par nos éminents spécialistes!




Le thermopolium

Le 14 août, nous visitons les églises de l'Esquilin, une autre des sept collines de Rome. Nous faisons connaissance avec sainte Pudentienne et sainte Praxède, filles du pieux Pudens. Si l'église de Sainte Pudentienne fait le bonheur de nos organistes, qui peuvent nous faire profiter de leurs talents à quelques mètres de la mosaïque du choeur, celle de Sainte Praxède fait plaisir à une personne de notre groupe, qui a le plaisir de reconnaître dans la mosaïque du choeur le pape Pascal I er , doté de son auréole carrée, car encore vivant à ce moment-là, grand (re)bâtisseur devant l'Éternel! Et nous ne pouvions pas ne pas nous rendre dans la célèbre basilique de Sainte Marie Majeure, où nous avons pu admirer l'absence de représentation de la Nativité et vénérer les reliques de la sainte Mangeoire...

Le 15 août, fête bien sûr de l'Assomption, tout est fermé à Rome. Aussi vivrons-nous dans cette journée un temps de désert que nous passons à plusieurs dizaines de kilomètres de Rome, à Subiaco: c'est là que se trouve le monastère où vécut saint Benoît7, ainsi qu'un couvent consacré à sa soeur Scholastique. Nous pouvons vérifier la parole de l'Évangile: les derniers seront les premiers8... mais aussi que prendre le bus de retour peut s'agrémenter de quelques complications9!

Le lendemain, nous franchissons le Tibre pour gagner le Trastevere, quartier qui garde des traces de son passé médiéval. Évidemment, les églises ne manquent pas: San Francesco a Ripa, Saint-Chrysogone, Sainte Marie du Transtevere et Sainte Cécile. Cette dernière église est, selon un autre pèlerin qui nous a accompagné du début à la fin, la plus laide de Rome. C'est là donc le jugement de Romée, un pèlerin moderne à Rome... donc très subjectif10! Il est vrai que l'église n'est pas la plus belle que nous ayons vue, mais rappelons déjà que sainte Cécile est la patronne des musiciens, ce qui à mes yeux lui confère quelques points d'avance; mais surtout, lorsque l'on en visite la partie souterraine, on trouve l'ancienne église magnifiquement décorée et en particulier une représentation de sainte Cécile et saint Valérien. Enfin, nous avons eu la chance de pouvoir accéder aux fresques qui se trouvent dans le couvent des soeurs installées à côté, et elles suffisent à effacer les réticences que pourrait causer une lecture trop rapide du bon Romée! Le père Husson11 nous a invité à prendre notre repas sur la terrasse de son couvent: nous faisons auparavant un petit crochet par l'église Saint-Georges du Velabre, assurément une des plus belles que nous ayons vues dans sa grande sobriété; deux d'entre nous se glissent parmi les touristes japonais qui se pressent autour de la Bocca della Verità12 et parviennent à rentrer dans l'église vide de Santa Maria in Cosmedin, dont les fresques médiévales sont un chef-d'oeuvre du genre. Puis nous avons rendez-vous à Radio Vatican, où nous découvrons le studio d'enregistrement en direct et le studio dédié depuis peu à un certain Karol Wojtyla...




L'intérieur de Radio Vatican.

Le 17 août, nous mettons à l'honneur un saint qui a joué un grand rôle dans l'histoire du pèlerinage de Rome: il s'agit de saint Philippe Neri, dont nous avons rappelé la mémoire la semaine dernière13. C'est donc dans la Chiesa Nuova, où se trouve le tombeau du saint, que nous commençons la journée par une célébration eucharistique. Le Père nous appelle ensuite à nous rendre à nouveau dans le Trastevere, pour rencontrer Mgr Ardura, secrétaire du Conseil Pontifical à la Culture. L'occasion aussi de croiser un vieil ami basque de notre aumônier, S.E. le cardinal Etchegaray. Puis direction Saint- Pierre, pour visiter les fouilles que Pie XII a fait faire sous la basilique, et qui ont mis au jour le tombeau de Pierre. La fin d'après-midi, dans la continuité du matin, est très baroque, avec la visite de Saint-Ignace et surtout celle du Gesù, l'église des jésuites, où repose le fondateur de l'ordre, saint Ignace de Loyola14. La journée se clôt par la rencontre d'un membre de la Secrétairerie d'État à Saint-Louis des Français, qui, comme son nom l'indique, est l'église de la paroisse française de Rome.

Le 18 août, nous voilà partis pour faire un tour des églises baroques du Quirinal: nous commençons par Sainte Marie de la Victoire, où nous admirons (le mot est faible) l'Extase de Sainte Thérèse d'Avila par Le Bernin; et la sacristie nous plonge au coeur de l'histoire, avec une série de tableaux représentant les opérations militaires de la bataille dite de la « Montagne Blanche », lieu-dit situé près de Prague, en 1620. Remercions au passage le Père Armogathe pour ses commentaires éclairés15! À Saint-Charles des Quatre Fontaines, nous trouvons porte close, découvrant à quel point les Romains se sentent libres de leurs horaires... Direction donc Saint-André du Quirinal, dont les portes sont ouvertes, où nous visitons le lieu où a vécu le tout jeune saint Stanislas Kotska. Deux d'entre nous auront la chance de rentrer quand même dans Saint-Charles, pour y admirer le plafond alvéolé.

Ensuite, ce sont deux grandes basiliques qui nous attendent: Saint-Jean du Latran et Saint-Paul hors les Murs. La première se distingue par le rôle qu'elle joue dans la papauté et par le baptistère — un des rares aussi bien conservés —, malheureusement fermé quand nous y étions; la seconde quant à elle a perdu de son importance. Ah, d'ailleurs, c'est ce jour-là où nous avons enfin pu visiter les fouilles sous l'église des Saints Jean et Paul!

Le 19 août, il est temps de se séparer de notre guide, appelé vers d'autres climats, mais ce n'est pas sans faire auparavant une visite guidée italien-allemand-français des catacombes de Priscille, dont les fresques très anciennes montrent des scènes bien connues: les trois enfants16, la Cène... C'est à M. Carrié qu'il revient de nous diriger vers le mausolée de sainte Constance, avec ses très belles mosaïques murales, puis vers la Crypte de Balbus, dont nous nous souviendrons toujours avec émotion de la visite guidée17... Le reste du temps est laissé à la libre appréciation de chacun: si certains décident de profiter d'une glace bien méritée, et longtemps convoitée, deux d'entre nous ont la surprise de se croiser à Saint-Laurent hors les Murs, où se trouvent les reliques de saint Étienne Protodiacre et saint Laurent.

Puis vient le temps du dernier repas pris ensemble, qui pour une fois ne le sera pas dans le Pizzarito de la Via Nazionale, où nous avions élu domicile (presque) tous les soirs!




Un repas tala...

Le 20 août, nous quittons à regrets la Ville Éternelle, bien conscients de ne pas avoir vu toutes les églises que le pèlerin de Rome, selon une affiche que l'on voyait tous les jours chez les Théatins, doit visiter... Nous prenons toutefois le temps d'aller à la célébration dominicale à la Chiesa Nuova, en italien dans le texte bien sûr! Puis ce sont les adieux déchirants à l'aéroport: Marie-Amélie refuse de quitter l'ascenseur qui devait la ramener auprès de nous après son passage à la poste18, Raphaël essaie d'obtenir un 38 tonnes pour ramener ses affaires en France, Pascal et Madeleine essaient de faire passer du Fanta et du Sprite en douce, Pierre (Connaud) et moi chantons notre tube «préféré»19...

Et un grand merci à Christophe, jeune séminariste20, qui nous a accompagnés du début à la fin, de nous avoir supportés avec tant d'abnégation!

C'est dans la joie en tout cas que nous nous sommes retrouvés le 26 septembre, à l'Institut Bossuet pour le «retour de pélé», une messe suivie d'un repas dont Pierre (Petit) fut le magistral organisateur... Que dire de plus, sinon vous inviter à venir nombreux sur les routes de Compostelle l'année prochaine!!!

S.P.


Index du numéro.