Mais avec la prolongation de l'attente de la Parousie, un rapport complexe de la tradition au temps s'établit. La tradition est d'abord et avant tout comprise comme fidélité, sur le modèle de la religion juive. Fidélité à la parole originaire, mais aussi fidélité à l'enseignement des Pères. N'est-ce pas un dépôt précieux qui nous est transmis, une parole originelle, à la fois dans et hors le temps, qui donne valeur au présent ? Mais l'image, comme toute image, n'est pas parfaite. Car, d'âge en âge, le dépôt s'enrichit autour d'un noyau irréfragable, grâce aux travaux conciliaires, à la réflexion théologique, à la pratique des fidèles. La graine est destinée à porter du fruit. Ecrire un Sénevé sur la tradition, c'est donc nécessairement écrire un Sénevé sur le sénevé, cette semence lourde de promesses. Car il ne s'agit pas de rester prisonnier d'un passé sclérosant, mais de faire fructifier au présent le sens de la Révélation. La tradition est donc, pour l'Eglise vivante, un principe régulateur et la réalisation présente et homogène du sens originel.